La musique peut être considérée comme un fond sonore comme un autre. C’est sans doute sa fonction la moins élevée, mais elle a tout de même une utilité, celle de colorer notre quotidien, d’aider à certaines tâches plus fastidieuses.
Lorsque nous recevons des invités, si nous ne connaissons pas leur capacité à enchaîner une conversation, la musique d’ambiance peut être une manière de ne mettre personne mal à l’aise.
Ce peut être aussi cette assez récente musique « lounge », qu’on a qualifiée de musique d’ascenseur (et ma foi, elle y a son rôle puisqu’elle peut occulter un moment la peur d’y être coincé ?), qui propose une ambiance étale, parfois étrange, toujours rassurante. Avouons qu’elle peut être idéale dans les embarras de la circulation, lot quotidien de pas mal d’entre nous. Elle calme, elle décontracte sans trop nous distraire.
« La musique d’ambiance… n’est pas innocente. Elle n’est pas qu’une façon de dominer les bruits pénibles du travail. Elle peut être l’annonce du silence général des hommes » écrit Jacques Attali dans «Bruits ».
J’avoue que Jean-Sébastien Bach, dans certains morceaux très « arithmétiques » (C’est Paul Claudel qui la qualifiait d’âme de la géométrie dans son « Journal »), que j’écoutais en boucle (en réalité, c’était à l’époque pas si lointaine des 33 tours en vinyle où le bras du « pick-up » revenait automatiquement à son point de départ…), a eu cette fonction lors de la rédaction de textes compliqués, demandant de la concentration. J’essayais aussi de couvrir les conversations, les appels, les éclats de rire des enfants qui couraient dans ma petite maison !
Aujourd’hui, à part les exemples cités, il m’est presque impossible d’écouter de la musique en ayant une autre activité prenante. Mais c’est sans doute aussi une faculté de la jeunesse (et adolescente) que celle de pouvoir écouter (fort) de la musique en travaillant ?
Idéalement toutefois la musique devrait souligner nos pensées : « La musique forme, à ses pensées (de Sosthène), une sorte de toile de fond, un décor sonore et harmonieux « (Georges Duhamel « Manuel du protestataire »).
Mais la musique a un autre rôle : celui de nous emmener ailleurs ; un ailleurs qui peut être situé au plus profond de nous. Cette magie des œuvres d’art est unique ! La tendresse d’un accord nous renvoie aux plages ensoleillées de notre enfance ; la surprise d’un enchaînement de l’orchestre fait apparaître des visages qu’on croyait oubliés ; un lento majestueux peut aussi nous faire voir le bilan de notre parcours dans l’existence.
Ces jours-ci, j’écoutais un jeune chanteur espagnol, révélé par le Net, Youtube, etc. et conseillé par mon « agente » vénézuelienne : Pablo Alboran. Une merveille de sensibilité, d’ambiance, d’émotion… Et puis tout ce jazz, que je décris, écoute, apprécie de jour en jour…
On parle parfois de musique céleste, de la musique des anges. Quelle est-elle ? Est-ce la musique des harpes ? A vrai dire, il n’y a pas si longtemps, j’ai voulu écouter plus attentivement les six pièces pour harpe de Mozart, par exemple. Est-ce la maturité, voire l’âge ? Je trouve en effet cette musique céleste, comme un prélude à autre chose, qui se situerait hors du temps et de l’espace !
« Swann tenait les motifs musicaux pour de véritables idées, d’un autre monde, d’un autre ordre, idées voilées de ténèbres, inconnues, impénétrables à l’intelligence » écrit Marcel Proust dans « Du côté de chez Swann ».
A-t-on assez répété que notre situation accidentelle d’humain n’était qu’un passage ?
Stéphane Mercier a dit:
tellement vrai tout cela, et j’ajouterai « la musique apporte de l’espace méditatif aux personnes qui pensent trop ou trop vite », pensées que j’ai eu en jouant il y a peu 🙂
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jacquesmercier a dit:
Que j’ai eue aussi en t’écoutant ! Bisous
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Stéphane a dit:
vraiment? waouw comme disent les jeunes aujourd’hui 🙂
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jacquesmercier a dit:
🙂
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jacquesmercier a dit:
Excellent point de vue, Philippe ! Merci de l’avoir exprimé !
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Philippe DAMAS a dit:
Je suis bien d’accord avec vous, effectuer un travail qui nécessite un tant soit peu de concentration devient quasiment impossible avec un fond sonore. Mais je ne pense pas qu’il s’agisse d’une question d’âge. C’est plutôt, selon moi, la preuve de tout l’intérêt que l’on porte à la musique. Pour ma part il m’est impossible de me contenter d’entendre de la musique, il faut que je l’écoute. C’est pourquoi, finalement, je n’aime pas trop les musiques de fond, d’ambiance…. Ou que je me trouve, dans un restaurant par exemple, si cette musique me plait, elle me distrait de la conversation, car je tends l’oreille pour mieux la percevoir, l’apprécier, savoir ce que c’est, de qui elle est…. C’est plus fort que moi ! Du coup j’ai l’air ailleurs et donne l’impression d’y être mieux…. Mais, après tout, comment percevoir la « note bleue » si on n’écoute pas attentivement. Et quand cette musique ne me plait pas, ça m’énerve….. Donc je suis le pour une chose à la fois.
Je profite de me trouver quelques lignes sous Stéphane Mercier, pour lui dire tout le talent que je lui trouve et qu’il a et qu’il me serait particulièrement désagréable d’avoir à l’entendre au fond alors qu’il mérite d’être écouté au tout premier plan.
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berger elisabeth a dit:
Nietzsche ne disait-il pas : « La vie sans musique est tout simplement une erreur, une fatigue, un exil. » Comme vous, Jacques, quand j’écoute de la musique, je ne fais que cela…
Et je suis ravie d’apprendre ce que disait Claudel à propos de Bach car, sans le savoir, j’ai toujours qualifié son œuvre ainsi
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jacquesmercier a dit:
Merci, Elisabeth !
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danielle dubus-charlemagne a dit:
bonjour Monsieur Jacques Mercier, j’apprécie votre point de vue sur la musique « comme fond sonore ». Pour ma part, lorsqu’elle est utilisée comme fond sonore, je la ressens comme une agression à mon espace spirituel ou tout simplement vital. Comme fond sonore, aujourd’hui, à mon sens, elle cache la peur inconsciente du silence. Alors elle nous est imposée partout : commerces, restaurants, dans les rues commerçantes, dans la grande distribution, chez les praticiens et para-praticiens dans leur salle d’attente… Il n’y a plus moyen de « respirer » le silence… Elle est partout ! Je bondis intérieurement lorsqu’invitée j’arrive chez mes hôtes et ô désespoir… une musique de fond rempli l’espace… ! et ce n’est pas toujours de mon goût bien sûr mais celui de la personne qui accueille. Je n’en peux plus ! Pourtant j’aime la musique, j’aime l’écouter.
Mais je suis incapable d’écouter celle-ci en faisant autre chose. Je la prend comme un livre… je m’assieds… j’ouvre le livre… je savoure les premiers mots… je sens le papier (je ne puis m’en empêcher)… C’est pareil pour la musique, moins la sensation olfcative… encore que… S’asseoir, écouter, laisser aller l’esprit, tous les sens disponibles, être à l’affût des variations… haaa ! quel plaisir… !
Mais cette over-dose de musique qui m’est imposée partout a eu un effet très nefaste sur moi : je n’écoute pratiquement plus de musique car mon cerveau la reçoit comme un ennemi, comme une intruse… J’ai un besoin immense de silence-naturel- et mon cerveau rejette à mon insu tout bruit provenant de l’activité humaine, y compris même la musique. J’arrive encore cependant à dépasser le phénomène et de mettre Mozart et plus récent « grand corps malade », entre autre… mais je ne peux écouter longtemps… voici donc les méfaits sur moi de la musique envahissante !
PS : j’adore vos citations postées sur tweeter ! merci ! c’est un vrai plaisir de les découvrir.
danielle
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jacquesmercier a dit:
Merci, Danielle. J’ai écrit ici même un texte sur le silence… Et je comprends ce point de vue !
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danielle DUBUS a dit:
MERCI de comprendre… LOL !
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jacquesmercier a dit:
😍
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